Ballerina : Ana de Armas Pirouette avec Violence dans l’Univers de John Wick

Films / Publié le 13 octobre 2025 par Claire
Temps de lecture : 16 minutes

Quand la ballerine devient tueuse

Après cinq ans à observer l’évolution du cinéma d’action, je peux affirmer que Ballerina représente un moment charnière pour l’univers John Wick. Ce spin-off de 2025, réalisé par Len Wiseman, met en vedette Ana de Armas dans le rôle d’Eve Macarro, une ballerine devenue assassin qui affronte une armée de tueurs pour venger la mort de son père. Le film, sous-titré « From the World of John Wick », se déroule entre les événements de John Wick: Chapter 3 – Parabellum (2019) et Chapter 4 (2023), élargissant ainsi cet univers ultra-stylisé de criminels, de règles arcanes et de violence chorégraphiée.

Sorti en salles aux États-Unis le 6 juin 2025 par Lionsgate, après des reshoots en février 2024, le film a été reporté d’un an par rapport à sa date de sortie initiale. Cette période de post-production prolongée a suscité des inquiétudes chez les fans, mais le film a finalement reçu des critiques généralement positives et a rapporté 137 millions de dollars dans le monde entier pour un budget de production de 90 millions.

Avec un casting de soutien impressionnant incluant Anjelica Huston, Gabriel Byrne, Lance Reddick (dans sa dernière apparition à l’écran), Norman Reedus, Ian McShane et bien sûr Keanu Reeves, Ballerina avait tous les ingrédients pour réussir. La question demeure : ce spin-off peut-il tenir debout sans que John Wick soit au centre de l’action ?

La vengeance en pointes

Se déroulant pendant les événements de John Wick: Chapter 3 – Parabellum, le film suit Eve Macarro (Ana de Armas) qui commence sa formation dans les traditions d’assassins de la Ruska Roma. Cette assassin, formée dans les voies de la Ruska Roma, se lance dans une quête de vengeance suite à la mort de son père.

Le film explore ainsi les origines d’Eve, depuis ses débuts de ballerine classique jusqu’à sa transformation en tueuse redoutable. La mort brutale de son père, lui-même assassin, la propulse dans un monde de violence où la grâce du ballet rencontre la brutalité du meurtre. Eve doit naviguer dans les règles complexes du Continental et de la Table Haute tout en poursuivant ceux responsables de la mort de son père.

Le scénario, écrit par Shay Hatten (qui a déjà travaillé sur John Wick: Chapter 3 et 4), tisse habilement les fils narratifs de l’univers Wick tout en créant une histoire relativement autonome. Pour les néophytes, le film fonctionne comme un thriller de vengeance stylisé. Pour les initiés, chaque référence, chaque personnage secondaire et chaque règle évoquée enrichissent l’expérience.

Len Wiseman : Entre Underworld et John Wick

Len Wiseman, connu pour la franchise Underworld et le remake de Total Recall, prend ici les rênes d’un univers déjà solidement établi par Chad Stahelski. C’est un défi considérable : comment apporter sa propre vision tout en respectant l’esthétique et le ton distinctifs de la franchise John Wick ?

Wiseman opte pour une approche sage, préférant l’imitation respectueuse à l’innovation radicale. Son Ballerina ressemble indéniablement à un film John Wick, avec ses longs plans-séquences de combat, son éclairage néon stylisé, sa violence graphique mais presque chorégraphiée, et son sens de l’absurde bureaucratique.

Le réalisateur exploite intelligemment le passé de ballerine d’Eve pour créer des séquences d’action qui mêlent fluidité et brutalité. Les mouvements d’Eve dans les combats rappellent effectivement des pirouettes et des arabesques, créant une signature visuelle distincte qui la différencie de John Wick tout en restant cohérente avec l’univers établi.

Le dernier tiers de « Ballerina » est essentiellement une longue séquence d’action véritablement déjantée, et c’est le genre de divertissement sans prétention qu’on attend d’un film sous-titré « From the World of John Wick ». Cette observation capture parfaitement l’approche de Wiseman : donner au public exactement ce qu’il attend, avec suffisamment de panache pour que l’expérience reste fraîche et excitante.

Ana de Armas : La révélation action de l’année

Si Ballerina fonctionne, c’est avant tout grâce à Ana de Armas. L’actrice cubano-espagnole, déjà remarquée dans Blade Runner 2049, Knives Out et No Time to Die, prouve ici qu’elle peut porter un film d’action de grande envergure sur ses épaules.

Dans From the World of John Wick: Ballerina, la performance d’Ana de Armas est plus que suffisante pour élever le film au-dessus de la mêlée. Son Eve Macarro n’est pas une simple copie féminine de John Wick. Elle apporte sa propre vulnérabilité, sa propre rage, sa propre présence à l’écran.

Les critiques louent ‘Ballerina’ pour ses séquences d’action, sa chorégraphie et son intégration dans l’univers John Wick. La performance d’Ana de Armas est souvent mise en avant, beaucoup notant sa capacité à tenir son rang dans les scènes d’action. Et effectivement, de Armas est impressionnante physiquement. Elle a manifestement suivi un entraînement intense, et cela se voit dans chaque coup de poing, chaque cascade, chaque séquence de combat.

Mais au-delà de la prouesse athlétique, de Armas apporte une profondeur émotionnelle à Eve. On sent le poids de sa transformation, la perte de son innocence, la douleur de la vengeance qui la consume. Dans les moments plus calmes (rares dans ce genre de film), elle révèle les fissures dans l’armure de son personnage, les moments de doute et d’humanité qui rendent Eve attachante malgré son corps count impressionnant.

L’actrice a également bénéficié de l’expérience acquise sur No Time to Die, où elle avait déjà démontré des compétences en combat. Mais ici, elle va bien plus loin, devenant une véritable action star capable de rivaliser avec les plus grands du genre.

Keanu Reeves : Passage de témoin ou béquille narrative ?

La présence de Keanu Reeves en tant que John Wick dans ce spin-off soulève des questions intéressantes. « Ballerina » suggère que la franchise « John Wick » peut survivre sans Keanu Reeves, mais aussi qu’elle n’a pas encore trouvé le courage d’essayer. Cette observation frappe juste.

John Wick apparaît dans plusieurs scènes du film, principalement pour établir la connexion avec la chronologie existante et rassurer les fans que nous sommes bien dans le même univers. Sa présence apporte indéniablement de la légitimité au projet, mais elle soulève aussi la question : Ballerina aurait-il pu fonctionner sans lui ?

La réponse est probablement oui, mais Lionsgate n’était manifestement pas prêt à prendre ce risque. L’inclusion de Wick (et d’autres personnages familiers comme Winston et Charon) fonctionne comme une assurance, un filet de sécurité au cas où le public ne serait pas prêt à accepter un film de cet univers sans son protagoniste emblématique.

Cela dit, les scènes avec Reeves sont bien intégrées et ne donnent jamais l’impression d’être forcées. Elles enrichissent effectivement la chronologie de l’univers et créent des ponts narratifs intéressants avec les autres films. Il est également émouvant de voir Lance Reddick dans sa dernière apparition à l’écran en tant que Charon, ajoutant une couche de mélancolie involontaire au film.

Un casting de soutien exceptionnel

Au-delà de de Armas et Reeves, Ballerina bénéficie d’un casting de soutien remarquable qui enrichit considérablement l’univers du film.

Anjelica Huston reprend son rôle de la Directrice de la Ruska Roma, la figure maternelle sévère qui forme les assassins depuis l’enfance. Huston apporte une gravitas et une autorité naturelles qui ancrent les scènes de formation d’Eve.

Ian McShane revient en Winston, le propriétaire du Continental, avec son charisme britannique habituel et ses répliques ciselées. Sa présence rappelle la complexité politique de cet univers criminel.

Norman Reedus, star de The Walking Dead, apporte une énergie brute en tant que figure du passé d’Eve. Son personnage ajoute une couche émotionnelle supplémentaire à la quête de vengeance d’Eve.

Gabriel Byrne incarne l’antagoniste principal avec une menace sobre et contrôlée. Loin des méchants caricaturaux, son personnage est un businessman du crime, froid et calculateur.

Le style visuel du film, sa réalisation et sa musique sont également souvent salués, contribuant à créer une expérience cinématographique cohérente et immersive.

La chorégraphie de la violence : Ballet sanglant

L’ADN de la franchise John Wick réside dans ses séquences d’action méticuleusement chorégraphiées, et Ballerina ne fait pas exception. Les coordinateurs de cascades ont créé des combats qui fusionnent les mouvements de ballet classique avec des techniques de combat rapproché, créant une signature visuelle unique.

Les scènes de combat dans des environnements variés – un club de nuit, un entrepôt industriel, les couloirs du Continental – maintiennent une variété visuelle tout en escaladant constamment l’intensité. Le dernier tiers du film est essentiellement une longue séquence d’action véritablement déjantée, un crescendo de violence stylisée qui rappelle les meilleurs moments de la franchise principale.

La violence est graphique mais jamais gratuite, toujours au service de la caractérisation d’Eve. Chaque combat la transforme davantage, l’éloigne de la jeune ballerine innocente qu’elle était. La caméra de Wiseman capture cette évolution à travers des choix de mise en scène subtils : les mouvements deviennent plus brutaux, moins gracieux, plus désespérés à mesure que la vengeance la consume.

Le film utilise également intelligemment les armes emblématiques de la franchise – pistolets, couteaux, et occasionnellement des objets du quotidien transformés en armes létales. Une séquence particulièrement mémorable se déroule dans un atelier de couture, où Eve utilise des aiguilles, des ciseaux et du fil de manière créative et horrifiante.

L’univers John Wick : Expansion réussie ou exploitation cynique ?

Ballerina représente la première véritable tentative de Lionsgate d’élargir l’univers John Wick au-delà de son protagoniste principal. C’est un test crucial : cet univers peut-il supporter d’autres histoires, d’autres protagonistes ?

Sur le plan purement créatif, la réponse est encourageante. Le film est loué pour son intégration dans l’univers John Wick, respectant la mythologie établie tout en ajoutant de nouvelles couches. Nous apprenons davantage sur la Ruska Roma, sur le processus de formation des assassins, sur les règles complexes qui gouvernent ce monde criminel.

Le film explore également la dimension internationale de cet univers, avec des scènes tournées dans différentes parties du monde, rappelant que le Continental et la Table Haute opèrent globalement. Cette expansion géographique enrichit l’univers et ouvre des possibilités pour de futures histoires.

Cependant, on ne peut ignorer la dimension commerciale de cette expansion. Avec un budget de 90 millions de dollars et des recettes mondiales de 137 millions, Ballerina est un succès financier modéré mais suffisant pour justifier d’autres spin-offs. Lionsgate a déjà annoncé plusieurs projets dans cet univers, y compris une série télévisée The Continental et potentiellement d’autres films.

La question devient alors : combien de films cet univers peut-il supporter avant de diluer ce qui le rendait spécial ? John Wick fonctionnait en partie parce qu’il était un concept simple exécuté brillamment. En multipliant les points d’entrée, en complexifiant la mythologie, ne risque-t-on pas de perdre cette simplicité élégante ?

Ce qui fonctionne remarquablement

Ballerina possède plusieurs atouts majeurs qui en font une expérience cinématographique convaincante :

La performance d’Ana de Armas : Je ne le répéterai jamais assez, elle porte le film avec brio et prouve qu’elle peut être une action star de premier plan.

Les séquences d’action : Wiseman et son équipe livrent des combats spectaculaires qui honorent l’héritage de la franchise tout en apportant leur propre saveur.

Le respect de l’univers établi : Le film s’intègre naturellement dans la chronologie existante sans créer de contradictions majeures ou de retcons frustrants.

La direction artistique : L’esthétique néon, l’architecture imposante, les costumes élégants – tout contribue à créer un monde visuellement distinctif et mémorable.

Le rythme : Malgré une durée de plus de deux heures, le film maintient un rythme engageant, alternant action et moments plus calmes sans jamais stagner.

Où le film trébuche

Malgré ses qualités indéniables, Ballerina n’est pas exempt de défauts :

Manque d’originalité : Comme la série sur laquelle il est basé, il n’est pas original et après la énième fois où elle a survécu contre des obstacles innombrables pour combattre à nouveau, on se demande simplement combien de temps avant qu’elle revienne avec « Ballerina II – the Pirouette ». Cette critique pointe vers un problème réel : le film suit une formule très prévisible.

Développement du personnage limité : Au-delà de sa quête de vengeance, Eve reste un personnage relativement unidimensionnel. Nous apprenons peu sur ses espoirs, ses peurs, ses motivations au-delà de la vengeance.

Antagonistes génériques : Malgré la présence de Gabriel Byrne, les méchants du film manquent de la personnalité mémorable d’adversaires comme Viggo Tarasov ou le Marquis de Gramont des films principaux.

Dépendance à la franchise : Le film ne peut s’empêcher de multiplier les références et les caméos, parfois au détriment de sa propre identité. Il est difficile de savoir si Ballerina fonctionne vraiment comme un film autonome ou s’il nécessite la connaissance des autres films.

Tonalité parfois incohérente : Il y a aussi une comédie là-dedans. Comment fonctionne réellement la Table Haute ? Quelle est la relation précise entre un Adjudicateur, un Harbinger, un Concierge et un Manager ? Ils savent que cela n’a pas d’importance. Cette absurdité volontaire fonctionne dans les films John Wick, mais ici elle crée parfois une dissonance avec les moments plus sérieux du film.

Ballerina et la représentation féminine dans l’action

Il est impossible de discuter Ballerina sans aborder la question de la représentation féminine dans le cinéma d’action. Ana de Armas rejoint ainsi une lignée croissante d’actrices – Charlize Theron dans Atomic Blonde, Emily Blunt dans Edge of Tomorrow, Scarlett Johansson dans Lucy – qui prouvent que les femmes peuvent porter des films d’action majeurs.

Ce qui est encourageant avec Ballerina, c’est qu’Eve n’est pas simplement « John Wick mais une femme ». Son histoire, bien que suivant des beats narratifs familiers, est colorée par son expérience spécifique. Son passé de ballerine n’est pas qu’un gimmick visuel mais informe sa personnalité, sa relation au corps, sa compréhension de la discipline et du sacrifice.

Le film évite également (pour la plupart) les pièges communs des films d’action avec protagonistes féminines : pas de romance forcée, pas de sexualisation gratuite, pas de besoin constant de justifier pourquoi une femme serait capable de se battre. Eve est simplement une assassin compétente, point final.

Cependant, on peut regretter que le film n’explore pas plus profondément les implications genrées de son histoire. Comment l’expérience d’Eve diffère-t-elle de celle de John Wick dans ce monde ultra-masculin de la pègre ? Le film effleure cette question sans jamais vraiment l’approfondir.

Un spin-off qui tient la route

Le film obtient une note de 6.9 sur IMDb, ce qui reflète une réception généralement positive mais pas enthousiaste. C’est une évaluation juste pour un film qui accomplit ce qu’il se propose de faire sans véritablement transcender son genre ou sa franchise.

Après cinq ans à critiquer des films, j’ai appris à apprécier les films qui connaissent leurs limites et travaillent brillamment dans ces contraintes. Ballerina est précisément ce type de film. Ce n’est pas une révolution du cinéma d’action, ce n’est pas une déconstruction audacieuse de la franchise John Wick. C’est un spin-off compétent et divertissant qui élargit l’univers tout en livrant les séquences d’action spectaculaires que le public attend.

Ana de Armas émerge comme une véritable action star, capable de porter une franchise sur ses épaules. Len Wiseman prouve qu’il peut naviguer dans les eaux stylisées de cet univers tout en apportant suffisamment de sa propre vision. Le film honore l’héritage de la franchise tout en posant les bases pour de futures expansions.

Les points positifs :

  • Performance exceptionnelle d’Ana de Armas
  • Chorégraphie d’action impressionnante
  • Intégration respectueuse dans l’univers existant
  • Direction artistique soignée
  • Casting de soutien solide

Les points négatifs :

  • Manque d’originalité narrative
  • Personnages secondaires sous-développés
  • Dépendance excessive à la franchise principale
  • Prévisibilité structurelle
  • Tonalité parfois incohérente

Une pirouette réussie dans l’univers Wick

Ballerina n’est pas le meilleur film de la franchise John Wick – cette distinction appartient toujours au Chapter 4 ou au premier film selon les préférences. Mais c’est une preuve de concept réussie que cet univers peut supporter d’autres histoires et d’autres protagonistes.

Pour les fans de John Wick, c’est un complément essentiel qui enrichit la mythologie et offre deux heures de violence chorégraphiée de haute qualité. Pour les néophytes, c’est un thriller de vengeance stylisé avec une protagoniste charismatique et des séquences d’action mémorables.

Le film prouve que l’univers John Wick est suffisamment riche pour supporter des expansions, mais il rappelle aussi que la formule a ses limites. Chaque nouveau film dans cet univers devra trouver sa propre voix, son propre angle, pour éviter la répétition et la fatigue de la franchise.

Ana de Armas mérite de voir Eve Macarro revenir dans de futures histoires, que ce soit dans des séquelles directes ou des caméos dans d’autres films de l’univers. Elle a gagné sa place aux côtés de John Wick dans le panthéon des assassins élégants mais mortels.

Verdict : Un spin-off solide qui prouve qu’Ana de Armas peut porter un film d’action majeur et que l’univers John Wick a encore des histoires à raconter. Ballerina ne révolutionne rien mais offre exactement ce qu’on attend de lui : de l’action spectaculaire, une protagoniste charismatique, et deux heures de divertissement violent et stylisé. Pour les fans de la franchise, c’est un visionnage essentiel. Pour les autres, c’est un thriller d’action compétent qui vaut le détour.

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Claire

Je suis Claire, critique passionnée avec un regard acéré pour les détails artistiques. Mes critiques mêlent profondeur et élégance, offrant des perspectives uniques sur les médias. Avec une plume raffinée et une compréhension fine des œuvres, je m'efforce d'enrichir le dialogue et d'éclairer les spectateurs.

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