Certains L’Aiment Chauve : une comédie capillaire

Films / Publié le 19 novembre 2025 par Claire
Temps de lecture : 9 minutes

Sorti en salles françaises le 16 juillet 2025, Certains L’Aiment Chauve s’est rapidement imposé comme l’une des comédies les plus visibles de l’été, notamment grâce à son casting très populaire et son sujet volontairement universel : la calvitie masculine et toutes les insécurités qui l’accompagnent. Réalisé par Camille Delamarre, cinéaste habitué aux films d’action et aux comédies grand public, le long-métrage s’inscrit dans une lignée de productions françaises cherchant à croiser humour, drame léger et commentaire social contemporain. Avec Kev Adams, Michaël Youn, Rayane Bensetti et Chantal Ladesou en têtes d’affiche, le film ambitionne de livrer une satire tendre sur l’apparence, le regard des autres et les illusions que chacun entretient pour tenter de rester dans la norme.Comédie grand public au budget d’environ 10 millions d’euros et d’une durée d’1h22, Certains L’Aiment Chauve tente un mélange délicat entre rythme humoristique et enjeux émotionnels, tout en cherchant à délivrer un message positif sur l’acceptation de soi. Cette critique propose une analyse approfondie de son récit, de sa mise en scène, de ses performances d’acteurs et de son propos social, afin d’évaluer sa place dans la comédie française contemporaine.

La phobie capillaire

Zacharie (Kev Adams) est un jeune homme dynamique, sûr de lui, animateur d’événements et influenceur à ses heures perdues. Tout semble lui sourire : un travail stable, un cercle d’amis loyal, une relation amoureuse solide et une présence numérique qui flatte son ego. Jusqu’au jour où il découvre une poignée de cheveux sur son oreiller.

Ce qui pourrait être une simple alerte anodine devient un tremblement de terre intérieur. Zacharie, paniqué, multiplie les diagnostics en ligne, les rendez-vous chez des spécialistes plus ou moins crédibles et les remèdes “miracles”… qui n’ont bien sûr rien de miraculeux.

Dans cette descente en spirale capillaire, il trouve du soutien – parfois maladroit – auprès de son ami Joseph (Michaël Youn), dont l’humour corrosif n’aide pas toujours, et de Julian (Rayane Bensetti), qui tente de lui faire comprendre que la confiance ne pousse pas comme des cheveux. Sa mère, interprétée par Chantal Ladesou, apporte quant à elle un contrepoint comique et tendre : elle tente tant bien que mal de soutenir son fils tout en multipliant les répliques savoureuses.

Entre quiproquos, crises d’ego, faux diagnostics, illusions et réalités, Zacharie devra apprendre que la perte de cheveux est peut-être le début d’une autre forme de maturité, et non une fin du monde comme il l’imagine. Le film suit ainsi ses efforts – parfois burlesques – pour se réconcilier avec son reflet et accepter que la beauté ne se résume pas à une densité capillaire.

Camille Delamarre : un réalisateur en quête d’équilibre entre rythme et comédie

Camille Delamarre, révélé par son travail sur Brick Mansions et plus tard par son implication dans des productions d’action européo-américaines, est un réalisateur qui comprend les impératifs du divertissement populaire. Son cinéma s’est souvent caractérisé par un sens aigu du rythme, un goût pour la dynamique visuelle et une volonté d’offrir au public un spectacle calibré.

Avec Certains L’Aiment Chauve, Delamarre explore un registre plus léger : celui de la comédie sociale, un terrain moins explosif mais tout autant exigeant. Il s’y aventure avec sérieux, cherchant à orchestrer une alchimie entre humour, émotion, messages implicites et timing comique.

La mise en scène se veut fluide, simple, sans excès stylistiques mais toujours efficace. Le réalisateur se concentre sur les interactions, les échanges et les situations du quotidien transformées en ressorts humoristiques. Sa direction d’acteurs, plus fine qu’à l’accoutumée, accompagne le virage de Kev Adams vers un registre où la vulnérabilité devient plus centrale que le simple comique physique.

Les acteurs au cœur du dispositif comique

Kev Adams : un rôle sur-mesure

Kev Adams incarne Zacharie avec une énergie qui lui est propre, mais aussi un degré de fragilité rarement mis en avant dans ses précédents rôles. Le film lui offre une occasion de jouer non pas le jeune homme triomphant, mais celui qui doute, qui craque et qui s’agite face à un problème qu’il dramatise. Cette bascule vers la comédie émotionnelle constitue l’une des principales forces du film : Adams y trouve une justesse plus nuancée.

Michaël Youn : la démesure maîtrisée

Michaël Youn apporte une dimension plus explosive. En meilleur ami maladroit et volontiers excessif, il joue sur sa capacité à faire dérailler les situations avec un sens du burlesque assumé. Malgré un registre parfois attendu, son duo avec Adams fonctionne et fait partie des piliers de l’efficacité comique du film.

Rayane Bensetti : le contrepoint positif

Rayane Bensetti, dans un rôle plus posé, incarne la voix de la raison. Il tempère les excès des deux autres, et son personnage, plus mature, permet d’aborder la question de l’apparence de manière plus apaisée. Il sert à ramener le récit sur ses enjeux humains plutôt que comiques.

Chantal Ladesou : la reine de la punchline

Chantal Ladesou brille dans son rôle de mère fantasque mais bienveillante. Son interprétation repose sur un talent comique imparable : une diction singulière, une présence sonore immédiatement identifiable et un sens de la rupture de ton. Elle apporte une vivacité remarquable et contribue largement à l’énergie du film.

Analyse technique

Mise en scène

La mise en scène de Delamarre s’appuie sur un rythme soutenu. Les scènes s’enchaînent avec fluidité, sans jamais s’attarder inutilement. Le film assume son statut de comédie estivale : efficace, accessible, calibrée pour un large public.

Photographie et direction artistique

La photographie privilégie des couleurs chaudes, lumineuses, presque publicitaires. Ce choix esthétique traduit la personnalité de Zacharie : un jeune homme très connecté à une image idéale du monde, où tout doit briller. Les décors urbains et les environnements contemporains contribuent à renforcer le réalisme léger de l’ensemble.

Montage

Le montage est nerveux, jouant sur les ruptures comiques, les ellipses rapides et les contrastes émotionnels. Le tempo soutient le rire sans jamais le brusquer.

Musique

La bande-son, composée pour l’essentiel de musiques pop et de titres rythmiques, renforce le ton moderne du film. Elle accompagne les séquences de panique ou d’euphorie sans jamais prendre le pas sur l’action.

Thématiques : apparence, identité, masculinité

Le film se structure autour d’un sujet étonnamment peu traité dans la comédie française : la calvitie et le sentiment de perte de contrôle qu’elle engendre. À travers Zacharie, Certains L’Aiment Chauve explore les angoisses de l’homme contemporain face au vieillissement, la pression sociale de la jeunesse éternelle, et l’impact des réseaux sociaux sur l’identité personnelle.

Le film reste une comédie, mais il parvient à aborder ces thèmes avec une sincérité appréciable. L’aspect satirique se laisse deviner dans les scènes consacrées aux solutions miracles, aux influenceurs absents, et aux diktats esthétiques auxquels Zacharie tente désespérément de se conformer.

Production, coulisses et ambition commerciale

Avec un budget d’environ 10 M€, la production reste modeste mais solide pour une comédie française. Tourné en grande partie dans des décors urbains contemporains, le film s’appuie sur une direction artistique simple mais efficace.

Les coulisses révèlent un tournage fluide, orienté sur le rythme et l’efficacité des scènes. La campagne marketing a mis en avant Kev Adams et Michaël Youn, deux atouts de visibilité, ainsi que le ton léger du film, clairement ciblé pour l’été.

Réception critique et publique

À sa sortie, Certains L’Aiment Chauve a reçu un accueil contrasté mais globalement positif du public. Les spectateurs ont salué son humour accessible, ses acteurs investis et son propos plus profond qu’il n’y paraît.

La critique, de son côté, a davantage souligné les limites du film : un scénario parfois prévisible, une mise en scène très cadrée pour le divertissement, une certaine difficulté à s’émanciper des codes de la comédie française traditionnelle. Cependant, le film n’a jamais été perçu comme prétentieux : il assume son ambition populaire et délivre exactement ce qu’il promet.

Un apport modéré mais sincère à la comédie française

Certains L’Aiment Chauve n’est pas un bouleversement dans l’histoire de la comédie française, mais il apporte une piqûre de rappel bienvenue : on peut rire de tout, même de ses complexes, à condition de le faire avec bienveillance.

Le film propose une réflexion simple mais juste sur l’apparence, le regard des autres et la nécessité d’accepter ce que l’on ne peut pas contrôler. En ce sens, il s’inscrit dans la continuité d’une comédie française qui souhaite rester proche de son public et de ses préoccupations.

Comédie qui décoiffe

Certains L’Aiment Chauve est une comédie estivale honnête, vive et bien rythmée, portée par un Kev Adams plus sensible que d’habitude, un Michaël Youn déchaîné, un Rayane Bensetti attachant et une Chantal Ladesou irrésistible. Le film n’évite pas certains clichés du genre, mais il compense par une énergie sincère, un humour accessible et un sous-texte sur l’acceptation de soi qui touche juste.

Camille Delamarre livre une œuvre solide, calibrée pour faire rire sans chercher à révolutionner la comédie. Et parfois, c’est exactement ce dont le public a besoin : 1h22 de sourire, d’identification et de légèreté.

Pour un public en quête d’un divertissement simple, rythmé et humain, Certains L’Aiment Chauve remplit parfaitement sa mission — et rappelle que la confiance ne se mesure pas à la densité capillaire.

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Claire

Je suis Claire, critique passionnée avec un regard acéré pour les détails artistiques. Mes critiques mêlent profondeur et élégance, offrant des perspectives uniques sur les médias. Avec une plume raffinée et une compréhension fine des œuvres, je m'efforce d'enrichir le dialogue et d'éclairer les spectateurs.

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