« Fountain of Youth » : l’odyssée familiale qui flirte avec l’aventure

Films / Publié le 12 juin 2025 par Charles-Henry
Temps de lecture : 7 minutes
Film Fountain of youth
Film Fountain of youth

Fountain of Youth, réalisé par Guy Ritchie, est un film d’action-aventure ambitieux, pensé pour Apple TV+. Écrit par James Vanderbilt, il réunit John Krasinski, Natalie Portman, Eiza González et Domhnall Gleeson dans un récit global orienté chasse au trésor mythique. Sorti en streaming le 23 mai 2025, le film a intrigué par ses lofty ambitions visuelles (budget estimé à 180 M$), ses décors exotiques et sa production internationale — mais ses retours critiques sont mitigés.

Une quête ancienne, un lien fraternel moderne

L’intrigue s’ouvre sur Luke Purdue (John Krasinski), aventurier et voleur d’art, qui dérobe une toile précieuse à Bangkok pour échapper à des criminels. Il retrouve à Londres sa sœur Charlotte (Natalie Portman), conservatrice assagie en plein divorce. De vol en révélations, Luke entraîne sa sœur dans une expédition mondiale – jusqu’aux pyramides de Gizeh – à la recherche de la fontaine de jouvence, financés par Owen Carver (Domhnall Gleeson), milliardaire mourant. Leur mission traverse des terrains dangereux, où s’emmêlent énigmes historiques, jalousies fraternelles, agents d’Interpol et mercenaires, dont Esme (Eiza González), gardienne de légendes. Le duo oscille entre esquives mortelles, protestations émotionnelles et rapprochements inattendus.

Guy Ritchie : du gangsta à l’aventure familiale

Après des hits cultes comme Snatch ou The Gentlemen, Ritchie s’essaie à un genre plus héroïque, s’inspirant ouvertement d’Indiana Jones, Uncharted, ou Da Vinci Code. Le tournage s’est déroulé entre début 2024 (Bangkok, Vienne, Liverpool) et s’est conclu avec des scènes aux pyramides, incluant un hélicoptère Chinook sur le plateau égyptien — une première culturelle notable . Ritchie joue la carte spectaculaire : décors naturels, poursuites exotiques, cascades — le tout saupoudré de sa signature visuelle, même si certains plans — comme le drone ou les effets numériques — trahissent un recentrage marketing sur Apple TV+ plutôt que sur l’expérience ciné.

Son parti pris est clair : transformer une chasse au trésor en melting-pot visuel et émotionnel. Il sollicite l’universalité (passage par Vienne, Bangkok, Écosse) pour inviter à la déconnexion. Pourtant le récit s’essouffle dès qu’il s’aventure hors des duos fraternels, peinant à instiller le souffle mythologique promis .

John Krasinski & Natalie Portman : une fratrie digne, mais à deux vitesses

Krasinski retrouve son rôle de casse-cou charismatique, avec un sens de l’humour léger et une aisance naturelle devant la caméra. Il incarne un aventurier touchant, qui recolle les morceaux d’un passé commun avec sa sœur, souvent avec simplicité et charme.

Natalie Portman, quant à elle, campe une Charlotte plus lisse, parfois froide, en décalage volontaire avec son frère. Elle montre une belle énergie dans les séquences d’action (scuba, escalade), mais a moins de temps que Krasinski pour imposer une profondeur émotionnelle, ce que des critiques comme Screen Rant et Rotten Tomatoes ont souligné.

Le duo fonctionne quand leurs échanges révèlent complicité ou douleur, notamment lors de répliques fraternelles sincères. Mais le scénario peine à soutenir leur attache lorsque l’intrigue se disperse.

Des seconds rôles qui relancent (ou desservent) la machine

Domhnall Gleeson incarne Owen, mécène terminal plein de regrets. Son jeu, sobre, ponctue l’aventure d’une menace morale — un milliardaire prêt à tous les sacrifices. Eiza González en Esme amène une énergie nerveuse bienvenue dans les scènes de combat, apportant une tension physique, mais reste sous-développée.

Les autres personnages (interpretations d’Arian Moayed, Laz Alonso, Carmen Ejogo, Stanley Tucci) composent un environnement entourant l’enquête, sans apport;er trop de relief. Leurs présences servent un dispositif classique, et ne compensent pas la dilution du récit

Tournage & production : exotisme et échelle

Ritchie a privilégié les décors réels dès que possible. Bangkok, Vienne, Liverpool ou encore l’épave du Lusitania recréée en studio font partie de ses outils narratifs . Le tournage au pied des pyramides — sous surveillance touristique — a constitué un record technique et symbolique, notamment avec l’atterrissage du Chinook et une explosion maîtrisée.

Ed Wild, le directeur de la photographie, renouvelle avec Ritchie le contraste entre cadres serrés en intérieur (galerie, pyramides) et plans larges en extérieur. La partition de Christopher Benstead y ajoute une teinte électro-épique, marquant la transition vers un style plus grand public.

Innovation narrative ? Une quête qui se cherche

Fountain of Youth monte un récit sans réelle surprise : vol d’art, rupture fraternelle, quête mythique. Les références sont lisibles, parfois trop visibles. L’intérêt réside surtout dans le face-à-face entre frère et sœur, ainsi que l’originalité de certains décors exotiques.

Guy Ritchie ne réinvente pas le genre, mais mixe codes anciens (aventuriers, énigmes, décors iconiques) et besoin de streaming familier — action calibrée, humour léger, visuel ‘popcorn’. Le résultat divise : divertissement efficace pour l’été, selon certains ; tentative trop policée d’aventure globalisée, selon d’autres.

Réception critique : entre plaisir coupable et frustration

Les critiques se rejoignent sur un constat : Fountain of Youth est divertissant, mais dépourvu d’âme nouvelle. Rotten Tomatoes affiche 38 % de critiques positives, avec une note agrégée autour de 41/100 sur Metacritic. MaryAnn Johanson critique son manque de surprise, Robert Levin évoque une « mishmash » maladroite, et d’autres dénoncent un film aseptisé. Le Washington Post souligne les décors sublimes, regrettant un vide émotionnel .

Des voix plus indulgentes estiment que le film remplit son rôle de divertissement estival accessible streaming . Variety note que les scènes dans les pyramides et la dynamique frère-sœur constituent les moments les plus réussis.

Récompenses : un jeu modéré côté festivals

Fountain of Youth n’a pas reçu de grandes nominations aux Oscars, Golden Globes ou SAG, mais il a marqué les esprits avec ses prouesses techniques. La production en coulisse demeure saluée comme ambitieuse, notamment pour la logistique au pied des pyramides et la construction de décors à Leavesden Studio. Aucune récompense majeure à ce jour, mais l’équipe technique (photographie, effets) pourrait être reconnue lors de prix comme les Production Design Guild Awards ou Tech Oscars.

Une aventure spectaculaire, sans renouveler le genre

Fountain of Youth est avant tout une aventure filmée avec soin, une quête à échelle mondiale où la fratrie et l’architecture mythique rivalisent avec CGI et action calibrée. Guy Ritchie y développe une facette plus familiale et accessible, bien que l’absence d’ambition narrative véritable affaiblisse l’expérience.

Le duo Krasinski–Portman apporte une esthétique centrée sur le lien humain, même si le film ne parvient pas toujours à nourrir la promesse mythologique. Le casting, globalement compétent, reste desservi par la volonté commerciale de mixer univers mystique et divertissement mainstream.

Si vous cherchez un film d’aventure léger, joli et ponctué de moments exotiques, Fountain of Youth peut convenir. Mais si vous recherchez un souffle novateur dans la veine des classiques du genre, il laisse un goût d’ersatz : séduisant visuellement, mais manquant d’âme.

Partager cet article :

Voir le profil de Charles-Henry

Charles-Henry

En perpétuelle recherche de nouveautés culturelles en tout genre.

Soyez le premier à réagir

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

| Sur le même sujet