
Intense et mystérieux : une quête en terre perdue
Sorti début mars 2025, In The Lost Lands, réalisé par Paul W. S. Anderson, s’appuie sur une nouvelle de George R. R. Martin pour transporter le spectateur dans un univers sombre et fantastique. Malgré un accueil critique majoritairement froid, ce film propose une expérience davantage digne de la science-fantasy que de l’action brutale — un dispositif visuel ambitieux, des séquences à grand spectacle et un style plus original que les critiques ne le laissent entendre.
Un récit énigmatique dans un monde en ruines
Dans un futur post-apocalyptique, l’humanité survit sous le joug d’une reine en quête d’amour, qui fait appel à la sorcière Gray Alys (Milla Jovovich). Celle‑ci doit récupérer un artefact capable de transformer la reine en loup-garou. Elle est accompagnée du chasseur taciturne Boyce (Dave Bautista), traversant des terres hostiles infestées de monstres et de fanatismes religieux. Leur périple les conduit jusqu’à la redoutée Skull River, au cœur des légendaires “Lost Lands”.
Paul W. S. Anderson : un univers visuel assumé
Connu pour Resident Evil et Monster Hunter, Anderson se lance ici dans la fantasy épique. En s’éloignant du gore, il construit un univers post‑apo stylisé, métaphorique et atmosphérique. L’utilisation du moteur Unreal Engine pour les décors virtuels permet une immersion audacieuse — un mélange de western visuel et de dark fantasy, distant des adaptations télévisées de Martin.
Avec le directeur photo Glen MacPherson, il décline une palette de tons sépia, grisâtres, rehaussés par des éclairages contrastés et des touches de couleur — sang rouge vif, flammes, éclats visuels. Les scènes clés comme l’introduction du loup-garou ou la séquence du téléphérique suspendu révèlent une maîtrise visuelle certaine, digne d’un Sergio Leone fantastique revisité.
Milla Jovovich et Dave Bautista : deux figures fortes dans un décor hostile
Jovovich incarne une sorcière à la motivation incertaine, tourmentée par une malédiction la contraignant à exaucer les souhaits qu’on lui demande. Elle campe Gray Alys avec une retenue stoïque parfaitement adaptée au personnage énigmatique qu’elle incarne et qu’elle a aidé à façonner en tant que productrice exécutive.
Dave Bautista est le point d’ancrage émotionnel du duo. Plus expressif, il interprète un chasseur hanté par son passé, capable d’ironie et de compassion. Il porte le rôle avec sérieux, apportant une tension nécessaire aux confrontations physiques et morales du récit. Quant aux seconds rôles, Amara Okereke en reine Melange ou Arly Jover en implacable Ash apportent une qualité visuelle forte, même si leurs personnages restent en retrait narrative.
Un tournage entre Pologne et images de synthèse
Le tournage s’est déroulé entre novembre 2022 et début 2023 dans la région d’Alwernia, en Pologne, avec des décors construits et de vastes plateaux verts pour les environnements virtuels. Le budget, estimé à environ 55 millions de dollars, a été employé majoritairement dans la création visuelle numérique, notamment des paysages, créatures surnaturelles et séquences d’action assistées par CGI. Ce choix technique marque une volonté d’innovation numérique, même si les critiques dénoncent parfois un usage exagéré de la post‑production.
Innovation numérique ou style tape-à-l’œil ?
Le film innove par l’intégration d’environnements composés via Unreal Engine, une démarche encore rare dans des productions de cette envergure. Le traitement du décor comme élément narratif — zones appelées Fire Fields, Shadow’s Bane, Skull River, illustrées par une carte interactive — accentue l’impression d’aventure à l’ancienne, mais avec des outils modernes.
Aliénées au récit, des touches comme un culte religieux visuel (croix tatouées, aviators, fusils modernes, crucifiements) apportent un antagoniste original, mêlant nature religieuse et esthétique punk post‑apo, renforçant l’identification de la nouvelle mythologie du monde présenté.
Une réception critique contrastée malgré des atouts
Selon Rotten Tomatoes, seulement 25 % des critiques étaient positives, avec une note moyenne de 3,6/10. Metacritic établit un score global de 41/100, signalant des avis généralement mitigés. Beaucoup ont pointé du doigt un scénario confus, des dialogues plats et un monde visuellement insipide. Le film n’a recensé aucune récompense majeure à ce jour.
Pourtant, certaines voix comme Polygon défendent l’œuvre comme une réussite esthétique audacieuse, capable de montrer ce que le cinéma de genre peut apporter en termes de création visuelle et d’innovation narrative, même face à l’indifférence critique.
Pourquoi redécouvrir cette Terre perdue
Si l’on dépasse les attentes d’un scénario traditionnel, In The Lost Lands mérite d’être vu comme un projet visuel ambitieux. Anderson y affirme un univers personnel, décoré d’effets soignés, de cadres inspirés — notamment les séquences où la magie nous plonge dans l’esprit d’un autre — et de plans spectaculaires bien chorégraphiés.
Le tandem Jovovich-Bautista, producteur et acteur à la fois, démontre une volonté commune de bâtir un récit à leur main, quitte à polariser. Leur intérêt commun pour l’œuvre de Martin se traduit ici par des scènes émotionnellement contenues mais visuellement fortes.
Une expérience à (re)contempler
In The Lost Lands n’est pas parfait : le rythme est parfois lent, les dialogues peu inspirés, et certains visuels paraissent datés ou sous-exploités. Mais en adoptant un regard bienveillant, on y perçoit une tentative de cinéma de genre original, une tentative de revisiter l’esthétique du western-fantasy avec des outils contemporains, et surtout une sensibilité visuelle rare dans le cinéma mainstream.
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