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Quand une artiste peut, en un clin d’œil, faire passer la salle d’Édith Piaf à Adele, de Céline Dion à Madonna, sans jamais perdre le fil ni l’émotion, on ne parle plus d’un simple tour de force : on parle d’un véritable show. Véronic DiCaire en Spectacle est précisément cela — un hommage généreux aux grandes voix d’hier et d’aujourd’hui, propulsé par une performeuse qui a fait de la métamorphose un art à part entière.
L’artisane derrière le tour de magie vocal
Franco-ontarienne née à Embrun, Véronic DiCaire s’est d’abord illustrée comme chanteuse et comédienne avant d’embrasser pleinement l’imitation, discipline dans laquelle elle a bâti une carrière internationale. Le grand public en France l’a découverte jurée de X Factor (M6) en 2011, puis candidate de Danse avec les stars en 2015, avant de la retrouver en 2024 dans Mask Singer (TF1). Ces jalons médiatiques ont accompagné une trajectoire scénique solide, nourrie par une technique vocale ultra précise et une présence scénique chaleureuse.
Sa renommée explose à Las Vegas à partir de 2013 avec VÉRONIC – Voices au Bally’s, où l’accroche « One singer… fifty voices » devient sa carte de visite. La presse locale salue alors son répertoire caméléon — de Shania Twain à Cher, de Dolly Parton à Adele — et sa capacité à basculer d’un style à l’autre sans perdre la justesse. Cette filiation « Vegas » irrigue encore aujourd’hui l’esthétique et le tempo de son spectacle.
Un grand cabaret pop où les icônes défilent
Dans Véronic DiCaire en Spectacle, l’artiste ne se contente pas de « refaire » des voix : elle habite des personnages. La proposition est pensée comme un cabaret pop où se succèdent plus d’une cinquantaine de signatures vocales — Édith Piaf, Adele, Céline Dion, Madonna et bien d’autres — portées par une mise en scène au cordeau. L’intention n’est pas l’imposture mais le portrait vivant : chaque timbre, chaque inflexion, chaque geste raconte ce qui rend ces artistes si reconnaissables.
Le show embrasse tour à tour l’énergie d’un concert et l’intimité d’un tour de chant. Selon les versions, DiCaire est entourée de danseurs et de musiciens — on a vu certaines moutures avec six danseurs et quatre musiciens — ce qui ouvre l’espace à de véritables tableaux chorégraphiés, lumières et arrangements inclus. Cela donne une soirée à la fois attachée à la performance vocale et résolument spectaculaire dans sa forme.
Une expérience scénique calibrée « grand public »
L’une des forces du spectacle, c’est son architecture rythmique. Les séquences sont pensées en montagnes russes : un medley à haute intensité (où l’on peut croiser, dans le même souffle, Rihanna et Lady Gaga), une respiration plus feutrée sur Piaf ou Kaas, un clin d’œil humoristique bien senti, puis un retour en puissance avec un hymne fédérateur. Cette alternance évite l’écueil de l’épuisement mimétique et emporte le public dans un récit musical qui a sa propre dramaturgie.
Sur le plan vocal, la précision est souvent bluffante : placement, grain, vibrato, articulation — DiCaire ajuste tout avec une acuité d’orfèvre. Mais c’est peut-être dans le corps que la magie opère le plus. Les micros gestes (un port de tête de Vanessa Paradis, un déhanché à la Tina Turner, une main de Céline Dion qui « sculpte » l’air) finalisent le trompe-l’œil. Résultat : on a la sensation d’être avec ces artistes, sans que l’hommage vire jamais à la caricature.
La mise en scène : vitesse, clarté, précision
Le spectacle est « réglé au quart de tour » — l’expression colle parfaitement — avec un soin particulier apporté aux transitions. Les habillages lumière et les arrangements servent la lisibilité de chaque « incarnation ». On devine dans cette mécanique une décennie d’allers-retours entre salles québécoises, scènes parisiennes et théâtres européens, où la performeuse a rôdé ses changements d’univers en quelques secondes. Plusieurs diffuseurs culturels qui programment le show décrivent d’ailleurs une proposition « calibrée », toujours efficace, qui séduit des publics très variés.
Une trace télé pour prolonger la fête
Fait notable : Véronic DiCaire – En spectacle a fait l’objet d’une captation diffusée à la télévision québécoise, ce qui permet de prolonger l’expérience pour celles et ceux qui n’ont pas pu s’y rendre en salle. TVA a annoncé un enregistrement assorti d’une diffusion (avec danseurs, musiciens et chorégraphies « renversantes »), et la plateforme TVA+ propose la captation en rattrapage. C’est une manière de mesurer à froid la qualité d’exécution… et de constater que l’énergie de la salle passe très bien l’écran.
Héritage Vegas, souffle européen
Ce que Véronic DiCaire en Spectacle hérite de Las Vegas, c’est la science du show : le goût des enchaînements rapides, l’exigence technique (voix, danse, lumière), l’idée que le public vient vivre un événement total. Ce legs s’est nourri d’une grande tournée européenne — on se souvient de passages au Grand Rex ou aux Zénith — où la critique saluait déjà « plus de 50 voix » et l’équilibre entre rock’n’roll et moments intimistes. L’artiste a même décroché en 2014 un titre au Best of Las Vegas Awards — catégorie « Best Singer » — dans le sillage de Voices.
Une actualité qui confirme l’éclectisme
Le talent de DiCaire ne se limite pas à l’imitation : il s’étend au jeu et à la comédie musicale. Son retour récent sur scène dans CHICAGO – La comédie musicale au Québec (où elle reprend le rôle de Roxie Hart, qu’elle avait déjà incarné en français dans Chicago) rappelle combien son sens du rythme et de la narration musicale dépasse la performance vocale pure. Une polyvalence qui rejaillit sur En Spectacle, notamment dans la direction d’actrice qu’elle s’applique à elle-même lorsqu’elle « devient » ses icônes.
Une critique résolument positive
Si l’on cherche ce qui rend Véronic DiCaire en Spectacle si attachant, on trouve trois qualités cardinales :
- La bienveillance : jamais le rire n’est aux dépens des artistes imités. Le trait d’esprit naît d’un détail affectueux (une intonation, une posture), pas d’une moquerie. Cela installe une ambiance de célébration qui fait du bien.
- La tenue musicale : les arrangements ne sont pas des pastiches au rabais. Ils respectent l’ADN des morceaux, tout en les adaptant aux besoins de la scène. La section rythmique a du nerf, les chœurs savent soutenir sans surligner, et les changements de tonalité — parfois vertigineux, d’une voix à l’autre — s’effectuent sans accroc.
- Le sens du spectacle : la variété des tableaux, les costumes, l’éclairage, la direction d’acteurs (pour elle-même et sa troupe) créent une signature visuelle claire. On sort avec l’impression d’avoir vu non pas un numéro d’imitations, mais un concert-récit qui traverse plusieurs décennies de pop et de chanson.
Bien sûr, chacun aura sa « voix préférée » — certains seront soufflés par la densité d’une Piaf miniature, d’autres par la pureté d’une Adele ou la projection très « live » d’une Céline Dion — mais l’essentiel est ailleurs : dans ce flux d’empathie qui relie une artiste à un panthéon musical partagé.
A voir pour passer un bon moment
À l’heure où nos playlists mélangent tout, Véronic DiCaire en Spectacle trouve le ton juste : celui d’une grande célébration populaire, techniquement irréprochable, où l’on rit, où l’on chante et où l’on se rappelle pourquoi ces voix nous accompagnent. DiCaire allie la virtuosité à une générosité rare. Si vous aimez les shows qui tiennent la promesse d’une soirée « plus grande que nature », foncez : vous serez conquis.
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Je suis Claire, critique passionnée avec un regard acéré pour les détails artistiques. Mes critiques mêlent profondeur et élégance, offrant des perspectives uniques sur les médias. Avec une plume raffinée et une compréhension fine des œuvres, je m'efforce d'enrichir le dialogue et d'éclairer les spectateurs.
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