« Megalopolis » : l’utopie déchue de Francis Ford Coppola

Films / Publié le 18 mai 2025 par Charles-Henry
Temps de lecture : 7 minutes
« Megalopolis » : l’utopie déchue de Francis Ford Coppola

Une ambition monumentale qui se heurte à la réalité

Avec Megalopolis, Francis Ford Coppola signe un retour aussi attendu que controversé. Ce projet pharaonique, mûri pendant plus de quatre décennies, devait être l’aboutissement de la carrière du réalisateur légendaire. Pourtant, malgré un budget colossal de 120 millions de dollars financé en grande partie par ses propres moyens, le film a connu un accueil critique glacial et un échec commercial retentissant, ne rapportant que 14,3 millions de dollars au box-office mondial .

Une fable romaine dans une Amérique décadente

Megalopolis se déroule dans une version alternative de New York, rebaptisée « New Rome », où l’architecte visionnaire César Catilina (Adam Driver) rêve de reconstruire la ville en une utopie futuriste grâce à un matériau révolutionnaire, le « mégalon ». Face à lui, le maire conservateur Franklyn Cicero (Giancarlo Esposito) s’accroche à un statu quo régressif, protégeant les intérêts des élites et des milices privées. Au cœur de ce conflit, Julia Cicero (Nathalie Emmanuel), fille du maire et amante de César, se retrouve déchirée entre deux visions opposées de l’avenir.

Francis Ford Coppola : le crépuscule d’un géant du cinéma

Réalisateur emblématique de la Nouvelle Vague américaine, Coppola a marqué l’histoire du cinéma avec des chefs-d’œuvre tels que Le Parrain et Apocalypse Now. Avec Megalopolis, il ambitionnait de livrer une œuvre testamentaire, mêlant science-fiction, politique et philosophie. Inspiré par la conjuration de Catilina dans la Rome antique, le film transpose cette intrigue dans une Amérique moderne en pleine décadence.

Cependant, le tournage a été entaché de nombreuses difficultés, notamment des départs massifs de techniciens et des controverses autour du comportement du réalisateur sur le plateau . Malgré ces obstacles, Coppola a persisté, convaincu de la nécessité de son œuvre.

Un casting prestigieux au service d’une vision chaotique

Le film réunit une distribution impressionnante :

  • Adam Driver incarne César Catilina, un architecte génial capable d’arrêter le temps, déterminé à bâtir une cité idéale.
  • Giancarlo Esposito joue Franklyn Cicero, le maire conservateur de New Rome, opposé aux projets de César.
  • Nathalie Emmanuel interprète Julia Cicero, tiraillée entre son père et son amant.
  • Aubrey Plaza, Shia LaBeouf, Jon Voight, Laurence Fishburne, Dustin Hoffman, Talia Shire, Jason Schwartzman, Kathryn Hunter, Grace VanderWaal, Chloe Fineman, James Remar et D. B. Sweeney complètent ce casting étoilé .

Le casting de Megalopolis réunit une pléiade d’acteurs talentueux, dont Adam Driver, Aubrey Plaza, Forest Whitaker, Laurence Fishburne et Jon Voight. Si certaines performances, comme celle d’Aubrey Plaza, ont été saluées pour leur intensité, d’autres, notamment celle de Jon Voight, ont été critiquées pour leur manque de nuance. Voight a d’ailleurs reçu le Razzie Award du pire acteur dans un second rôle pour sa prestation.

Malgré ce plateau de stars, les performances des acteurs n’ont pas suffi à sauver le film de la confusion narrative et de la surcharge visuelle qui le caractérisent.

Le rêve d’une vie : un projet de 40 ans enfin concrétisé

Francis Ford Coppola a consacré plus de quatre décennies à la gestation de Megalopolis, une œuvre qu’il décrit comme son projet le plus ambitieux. Commencée dans les années 1980, l’écriture du scénario a été interrompue après les attentats du 11 septembre 2001, qui ont profondément affecté la vision initiale du réalisateur. Ce n’est qu’en 2019 que Coppola relance le projet, déterminé à le concrétiser malgré les obstacles.

Pour financer ce film, Coppola a investi 120 millions de dollars de sa propre fortune, allant jusqu’à vendre une partie de son vignoble en Californie. Cette décision audacieuse souligne son engagement total envers une œuvre qu’il considère comme un testament artistique.

Une production tumultueuse : entre innovations technologiques et chaos sur le plateau

Le tournage de Megalopolis s’est déroulé dans des conditions complexes. Initialement, Coppola avait prévu d’utiliser la technologie révolutionnaire du « Volume LED » développée par Prysm Stages, permettant de projeter des décors immersifs en temps réel. Cependant, des contraintes budgétaires l’ont contraint à revenir à des méthodes plus traditionnelles, combinant effets spéciaux numériques et fonds verts.

Des témoignages de membres de l’équipe de production ont évoqué un tournage chaotique, marqué par des changements fréquents de direction artistique et des périodes d’inactivité prolongées. Certains ont décrit le processus comme « un accident se déroulant jour après jour », mettant en lumière les défis rencontrés lors de la réalisation de ce projet colossal.

Une fresque baroque : entre utopie et décadence

Megalopolis se déroule dans une version futuriste de New York, rebaptisée « New Rome », où l’architecte visionnaire Cesar Catilina (interprété par Adam Driver) s’oppose au maire conservateur Franklyn Cicero (Giancarlo Esposito) sur la reconstruction de la ville. Le film explore des thèmes profonds tels que la quête d’utopie, la corruption politique et le déclin des civilisations.

La narration est imprégnée de références historiques et philosophiques, mêlant des éléments de la Rome antique à des motifs contemporains. Coppola s’inspire notamment de la conjuration de Catilina, de Shakespeare, d’Emerson et de la poésie saphique pour tisser une œuvre dense et symbolique.

Accueil critique : un film qui divise

À sa sortie, Megalopolis a suscité des réactions contrastées. Certains critiques ont salué l’ambition et la vision artistique de Coppola, tandis que d’autres ont pointé du doigt une narration confuse et un excès de symbolisme. Le film a été présenté en compétition officielle au Festival de Cannes 2024, mais n’a pas remporté de prix majeur.

Sur le plan commercial, le film a été un échec, ne rapportant que 14,6 millions de dollars au box-office mondial, bien en deçà de son budget initial.

Un réalisateur en quête de sens : entre critiques et défense de l’art

Malgré les critiques et les récompenses peu flatteuses, Coppola a défendu son œuvre avec passion. Il a accueilli avec philosophie les Razzie Awards, déclarant être « ravi » d’être reconnu pour avoir pris des risques artistiques dans une industrie qu’il juge frileuse.

Le réalisateur a comparé son parcours à celui de Jacques Tati, soulignant l’importance de l’innovation et de la créativité, même au détriment du succès commercial. Pour Coppola, Megalopolis représente une tentative audacieuse de repousser les limites du cinéma et de proposer une réflexion profonde sur la société contemporaine.L

Une œuvre monumentale et imparfaite

Megalopolis est une œuvre qui ne laisse pas indifférent. Elle incarne la vision d’un réalisateur légendaire qui, à 85 ans, n’a pas hésité à investir sa fortune et son énergie dans un projet hors normes. Malgré ses défauts et son accueil mitigé, le film témoigne d’une ambition artistique rare et d’une volonté de questionner le monde à travers le prisme du cinéma.

En définitive, Megalopolis est une fresque baroque et audacieuse, reflet des aspirations et des contradictions de son créateur. Elle mérite d’être vue, discutée et analysée, ne serait-ce que pour saluer le courage d’un artiste qui a osé rêver grand.

Partager cet article :

Voir le profil de Charles-Henry

Charles-Henry

En perpétuelle recherche de nouveautés culturelles en tout genre.

Soyez le premier à réagir

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

| Sur le même sujet