
Depuis ses débuts dans l’ombre des blogs en 2011 jusqu’à son statut de superstar mondiale, The Weeknd – de son vrai nom Abel Tesfaye – n’a cessé d’évoluer, à la fois en tant qu’artiste et conteur d’émotions. Avec Hurry Up Tomorrow, sorti en janvier 2025, il clôt magistralement une trilogie entamée avec After Hours (2020) et Dawn FM (2022). Ce troisième opus, intense, introspectif et cinématographique, s’impose comme une œuvre complète et audacieuse, oscillant entre regrets nocturnes et quête de lumière.
Qui est The Weeknd ?
Né à Toronto, d’origine éthiopienne, Abel Tesfaye a conquis le monde par son timbre de voix si particulier – un falsetto céleste – et son univers visuel à la croisée du rétro, du futurisme et du drame intérieur. Après les débuts mystérieux de House of Balloons, il s’est imposé comme l’une des figures majeures de la pop contemporaine, collaborant avec Daft Punk, Beyoncé, Kendrick Lamar ou encore Ariana Grande. En 2021, il se produit lors de la mi-temps du Super Bowl, consacrant définitivement son statut d’icône.
Mais là où d’autres se reposent sur leurs acquis, The Weeknd a choisi d’explorer un récit narratif à travers une trilogie conceptuelle sur la mort, la rédemption et le sens de la célébrité. Hurry Up Tomorrow représente la dernière étape de ce voyage, peut-être la plus audacieuse.
Un album cinématographique, dense et audacieux
Avec ses 21 titres et près de 78 minutes d’écoute, Hurry Up Tomorrow s’impose comme une fresque sonore plus ambitieuse encore que ses prédécesseurs. Dès les premières notes de l’intro « Exit Sign (feat. Jim Carrey) », le ton est donné : nous sommes entre la vie et la mort, dans un espace liminal où le passé, le présent et l’avenir se confondent.
L’album agit comme un film, un opéra pop-futuriste. Abel, narrateur maudit, erre dans une sorte de purgatoire émotionnel. Il est à la fois victime et bourreau de son image, amoureux de l’idée de l’amour et incapable d’aimer autrement que dans l’autodestruction.
Les collaborations marquantes
The Weeknd sait toujours bien s’entourer, et ici il le prouve une fois de plus :
- Lana Del Rey prête sa voix éthérée à « Love in Reverse », un morceau tragiquement beau, à la frontière entre une balade romantique et une confession post-mortem.
- Anitta, sur « Digital Mirage », apporte une sensualité électronique inattendue. Le morceau est un savant mélange de funk carioca et de synth-pop européenne, rappelant les plus grandes heures de Giorgio Moroder.
- Playboi Carti explose sur « Static Hearts », une production hallucinée à la frontière de la trap et de l’indus, digne de Yeezus.
Chaque featuring est justifié, intégré dans le récit global, et non un simple coup marketing.
Une exploration sonore entre nostalgie et futurisme
Musicalement, Hurry Up Tomorrow s’inscrit dans la continuité de Dawn FM, mais avec une palette plus large et plus dramatique. On retrouve les synthés 80s, les beats électroniques et les basses vibrantes, mais aussi des éléments orchestraux, du spoken word, et même des chœurs religieux sur « Ashes of Eden ».
Quelques morceaux clés à retenir :
- « Hologram Kisses » : une pop atmosphérique puissante, portée par une ligne de basse hypnotique et une voix déformée par l’autotune. L’un des morceaux les plus émouvants de l’album.
- « The Crash » : sans doute l’un des sommets artistiques de l’œuvre, entre Radiohead et Depeche Mode. La montée dramatique est bouleversante.
- « Hurry Up Tomorrow », le morceau-titre : six minutes de transe sonore, où The Weeknd semble affronter ses démons pour la dernière fois, jusqu’à s’éteindre dans un souffle électronique.
L’ensemble est cohérent, traversé de motifs récurrents : le feu, l’accident, la lumière aveuglante, la radio qui grésille – autant de symboles de passage, d’urgence, de fin imminente.
Une narration complexe et fascinante
Ce qui frappe, c’est la manière dont The Weeknd tisse un fil rouge à travers l’album. Il ne s’agit pas d’une simple collection de titres mais d’un concept album, où chaque morceau a sa place dans le récit. On retrouve le DJ narrateur, introduit dans Dawn FM, incarné par Jim Carrey, qui intervient à plusieurs reprises ici comme une voix omnisciente.
Les paroles sont denses, pleines de métaphores autour de la mort, de la célébrité comme illusion, de la mémoire qui s’efface. Hurry Up Tomorrow est l’album d’un homme qui regarde sa vie comme un film déjà terminé, mais dont les souvenirs refusent de mourir.
C’est aussi une réflexion sur l’après-célébrité, sur le vide existentiel laissé une fois que tout a été atteint. Sur « Room 409 », Abel murmure :
« I sold my face, my faith, my name / Now no one’s left to hold the flame. »
Un adieu… ou un renouveau ?
Beaucoup voient Hurry Up Tomorrow comme la fin d’un cycle. En effet, The Weeknd a lui-même annoncé vouloir tourner la page de ce personnage sombre et torturé, qu’il a incarné pendant plus d’une décennie. Cet album, dense, personnel, est peut-être son œuvre la plus complète, un chant du cygne flamboyant avant de renaître autrement.
Il s’agit aussi d’une réflexion sur l’industrie, sur la fabrication de l’icône pop moderne. En bouclant cette trilogie avec une telle maîtrise, The Weeknd prouve qu’il est bien plus qu’un chanteur à succès : il est un artiste visionnaire, un cinéaste sonore, un conteur d’émotions en haute définition.
Verdict critique
Hurry Up Tomorrow est un album dense, exigeant, mais profondément gratifiant. Il ne se contente pas de recycler des formules gagnantes : il pousse plus loin les frontières de la pop, ose la narration complexe, et livre une émotion brute, sans filtre.
The Weeknd signe ici un projet ambitieux qui marquera l’année 2025, et peut-être la décennie, par sa cohérence, son audace, et sa puissance émotionnelle. Un chef-d’œuvre moderne.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Avez-vous écouté Hurry Up Tomorrow ? Quel est votre morceau préféré ? Avez-vous ressenti la même intensité émotionnelle que dans After Hours ou Dawn FM ?
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